Par Claude Narain

Claude Narain

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eychellois Paress…  Dans l’avion qui me ramenait cette semaine des Seychelles, je pensais à cette taquinerie bon enfant. Je mesurais à quel point elle est loin de la vérité. A force de travail, les Seychellois pourraient ravir aux Mauriciens une position qui devrait « naturellement » leur revenir : la Seychelles Tourism Academy (STA) est sur le point d’être la référence régionale en matière de formation hôtelière.

Jugez-en vous-mêmes.

Cette semaine, le président de l’école hôtelière des Seychelles a présenté les plans de son nouvel Hôtel d’application. Dans cet hôtel, 30 chambres seront proposées à des « vrais » clients et 30 aux étudiants étrangers. Il ouvrira d’ici deux ans. Les bénéfices d’une telle structure sont inestimables : il n’y a pas mieux que de s’exercer dans des conditions réelles.

Autre joli succès. Plusieurs pays étrangers choisissent les hôtels des Seychelles pour envoyer leurs étudiants en apprentissage. La STA a conclu des partenariats dans ce cens avec la Chine, la Belgique, Malte, Louisiane, Inde…. Tous ces pays ont jugé le niveau de qualité de ces hôtels suffisamment élevé pour y envoyer leurs jeunes en stage. Pourquoi s’intéressent-ils tous aux Seychelles et pas à Maurice ?

Mentionnons un autre point. Pour la troisième année, c’est une Seychelloise qui a été désignée Overall Best Student du Shannon College of Hotel Management, de l’Université d’Irlande. Les élèves de la STA intègre cette faculté pour préparer un Bsc In Hospitality Management, après avoir complété leur Advanced Diploma in Hospitality Management aux Seychelles. La grande qualité de ce diplôme 100 % seychellois ne fait nul doute.

Comment expliquer cette réussite ?

Je pense qu’elle tient d’abord à la personnalité du directeur de la STA. Ancien hôtelier et personnalité publique, Flavien Joubert connaît non seulement les opérations, mais est très respecté par les directeurs d’hôtels. Cette proximité est essentielle : elle facilite le va-et-vient entre hôtels et école. Pas une semaine ne se passe sans que celle-ci ne sollicite un professionnel pour une causerie ou un stage d’immersion pour ses enseignants.

Mais M. Joubert a d’autres mérites : la vision, l’humilité et la persévérance. En poste depuis dix ans maintenant, il a bénéficié de la continuité nécessaire pour mener son projet à bien. Un projet pour lequel, à peine nommé en 1999, il nous sollicitait. Une ébauche de programme en main, il avouait alors son ignorance en matière de pédagogie. Comment le groupe Constance aurait-il pu refuser son aide, avec deux hôtels démarrant leurs opérations aux Seychelles et face à une telle modestie ?

Le MoU signé entre Constance Academy et le gouvernement seychellois en 2000 s’est révélé être un formidable catalyseur. Il a permis le placement d’une dizaine d’élèves et de professionnels de l’hôtellerie et d’enseignants chaque année dans nos hôtels. Des stages qui sont toujours accompagnés de séances de formation à l’académie. Il a permis la consolidation du curriculum, puis la création sur nos conseils de l’Advanced Diploma de trois ans. Il a permis une multitude d’interventions de notre part, au gré des besoins. Il a permis une belle diversification des formations, le spa, la sommellerie…

Mais cette réussite a aussi été rendu possible grâce à l’entière autonomie dont jouit le directeur de l’école. Désigné par le président, il a carte blanche pour agir. Il a bien entendu obligation de rendre compte de ses décisions – au ministre du Tourisme, précisons-le, et non celui de l’Education. Ce fonctionnement est respecté, à chaque nouveau gouvernement. Seychelles a estimé fondamental pour son économie que l’hôtellerie soit traitée avec tous les égards. C’est d’ailleurs pour cela que le gouvernement couvre tous les frais, y compris la scolarité.

Il est clair que Maurice a contribué au succès de la STA. En me nommant Parrain de l’école, les Seychellois l’ont reconnu. Il convient dès lors de se demander pourquoi ce que nous avons fait pour les autres, nous ne pouvons pas le faire pour nous-mêmes… N’avons-nous pas, parmi nos hôteliers, des dizaines de « Parrains » prêts à se pencher sur cette Ecole hôtelière qui dépérit ? Il suffit de si peu pour redevenir la référence.

Claude Narain
Senior Training and External Relations Consultant, Constance hotels Resorts and Golfs